Parution dédiée à l’œuvre poétique d’essence mystique de Cheikh Mohmed Yellès-Chaouche de notre ami et collègue Professeur Hikmet Sari-Ali.

Nous avons eu l’immense joie de recevoir en ces jours bénis de châbane la dernière parution dédiée à l’œuvre poétique d’essence mystique de Cheikh Mohmed Yellès-Chaouche de notre ami et collègue Professeur Hikmet Sari-Ali. Ce recueil de poèmes est une véritable merveille, une corbeille des délices des cœurs et des âmes. Cheikh Mohamed Yellès Chaouche dit Benyellès (1855-1927) était un disciple de Cheikh Mohamed al–Bouzidi et Cheikh Mohamed al-Habri des Beni Znassan (Maroc oriental) (m. en 1892) qu’il rencontrait souvent avec un groupe d’autres mourides, dont Cheikh Larbi Tchouar. Il fonda la première zaouia ‘’Derquawiya-Hibriya‘’ à Tlemcen, en 1908. Par sa stature de faqih (jurisconsulte), sa zaouia attirait de jeunes ‘’mûrides‘’. Elle était devenue le cœur palpitant d’une fiévreuse activité de l’esprit, avec une certaine direction politique qui la rendra très suspecte aux yeux de l’administration coloniale. Cette zaouia accueillit à Tlemcen le nationaliste arabe Farid Bey, le Tunisien Tahar Benachour, professeur à la Zitouna et membre de l’académie arabe du Caire et de Damas, Abdelaziz Thaalibi, fondateur de ‘’hizb destour‘’, Koleïdi Mahieddine, etc. C’est auprès de la zaouïa ‘’Rahmat Allah‘’ de Cheikh Ahmed Ben Yelles Chaouch, cité parmi ses savants-théologiens, qui a préféré l’exil à Damas, que Messali Hadj eut son premier soutien indéfectible. Il participa à la ‘’Hidjra’’ de 1911 manifestant son refus à l’égard de la conscription des Algériens où l’enrôlement forcé était considéré aux yeux de tous de plus en plus comme une menace, voire une forme d’agression contre la volonté de la population ‘’L’exil pour la foi fut un grand moment, peut-être le plus significatif. De par son zèle patriotique et religieux, il fut inquiété à plusieurs reprises en raison de ses positions anticoloniales. Pour cette raison, il fut placé, par deux fois, en résidence surveillée ; la première fois à Oran, après son retour de pèlerinage, ensuite à Mostaganem où il profita en même temps de s’instruire de l’enseignement soufi auprès de son Cheikh Mohamed El Bouzidi, le maître de l’ordre des « Derquaouas », mort en 1909, instructeur également du célèbre soufi Ahmed el Alaoui plus connus sous le nom de Cheikh Benalioua (1874-1934). Au-delà de sa tonalité religieuse indéniable (Les docteurs classent ce devoir dans la catégorie des ‘’Ibâdât’’ ou actes d’adoration), il fut, pour d’autres, un voyage à dessein moins religieux. Les émigrants, grâce à un remarquable réseau d’informations assuraient de nuit une relative sécurité à leurs convois et cela, en faisant dévier leur cheminement le long des montagnes du Rif, en passant les Bani Znassen, jusqu’à Capo de Agua au large de Nador enfin, Tanger. Cet événement allait mettre à l’épreuve la conscience des doctes et cela, par-delà l’ampleur massive qu’allait prendre l’exode de familles entières vers les pays du Macre (Orient). Il allait même partager leurs rangs. D’autres Cheikh se montrèrent contrariés par la prise de position de Cheikh Larbi Tchouar (1845-1957), adepte également de la ‘’Tarîqa Hybria-Derqâouia’’, qui s’était montré moins empressé en s’avisant de tempérer le mouvement d’exode, décrété par les ‘‘Oulémas’’ comme une objection de conscience, demandant aux ‘’Mûrides’’ de se serrer les rangs afin d’éviter l’abandon non obligatoire du pays. Il considérait, selon ses conceptions religieuses, que l’exil ne pouvait s’imposer que ‘’lorsque le musulman ne pouvait se comporter en tant que tel, dans le pays occupé par l’ennemi’’ ’’ (Bénali El hassar, Les Jeunes-Algériens, Paris, 2013). Cheikh Benyellès s’établit à Damas où il fut prédicateur à la mosquée ‘’Iz-eddine al Souwayqa’’ puis à la mosquée ‘’al-Shaghour’’, à Samadiya. Son enseignement a laissé un fort impact religieux dans le milieu des savants orthodoxes de Damas.
Pr Hikmet Sari-Ali a le mérite accompli de mettre à la disposition des adeptes de la poésie mystique et initiatique l’une des manifestations les plus brillantes de l’art poétique religieux dans le Maghreb, entrant dans la tradition du ‘’Samâ’’, celle de Cheikh Moamed Yellès-Chaouche. Avec sa prose rimée constituée de métaphores et de paraboles, ces poèmes ont pour vocation de compléter les capacités contemplatives des ‘’Mûrides‘’ ou aspirants à la vie soufie dont l’enseignement est dans l’intimité d’une relation entre maître et élève. Ils ont une valeur d’étude à la fois littéraire et religieuse, et constituent un témoignage précieux et unique à l’étude dans le domaine de la spiritualité en Algérie et dans le Maghreb.

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